Le samedi, nous revenons à Carnarvon pour visiter le marché ainsi que les derniers coins sympas.
Un peu abattus par la recherche d'emploi infructueuse, Amélie brave à nouveau le désespoir et n'hésite pas à demander le diable (autre nom du travail pour un australien de souche) à une vendeuse de légumes qui, oh stupéfaction ! connaît qqu qui a besoin de main d'oeuvre. Le dénommé Juanito, ou « bebe » _prononcer bibi_ pour les intimes... pourquoi s'en priver !
Nous nous pointons chez bibi sur le champ et c'est parti pour la gloire : « You start this afternoon ». Autant dire que chez bibi, ça mouline vite ! Cet asiatique à 400% possède une petite exploitation de légumes (tomates, haricots, poivrons, etc.) et de fruits tropicaux (bananes) ou pas (pommes, fraises). Nous ne comprenons presque rien de ce qu'il raconte et ça tombe bien, car lui non plus. Les gestes sont bien plus explicites :)
On ramasse d'abord des haricots : Il ne faut pas qu'ils soient trop petits ! Nous entamons alors un travail éminemment intellectuel consistant à les repérer d'abord, puis les sélectionner en fonction de leur taille, les cueillir et les disposer par rangées dans une boîte, queue vers l'intérieur. Inexpérimentés que nous sommes, nous passons plus de temps à bien les choisir qu'à remplir les cagettes. Payés au rendement que nous sommes, nous gagnons péniblement 30$ à 2 en une aprem. C'est la loose...
Le lendemain, bibi, certainement impressionné par notre rendement de la veille, nous demande de ramasser des mauvaises herbes pour un forfait de 150$. On se dit : « bon facile, pour ce prix là ça doit prendre une demi-journée à tout péter ». T'inquiète, ...levés à 7h du mat', à 16h on y était encore à se péter les bras et le dos sur des mini-arbustes enracinés jusqu'au trognon, tout au long des travées de légumes.
Le surlendemain, c'est l'apothéose. On nous demande de cueillir des tomates : « See Kim, See Kim ! » nous fait bibi avec un geste pointant l'autre bout du champ. Quelques minutes de marche plus tard, aux antipodes de l'exploitation, entre deux plants de tomates, nous pouvons apercevoir un gnome au crâne étroit, en blanc de travail et affublé d'un masque à gaz post-catastrophe nucléaire en train de pulvériser depuis son tracteur des tonnes d'insecticide sur des pieds encore immatures. A notre vue, il saute de son engin et se met à bondir frénétiquement de pied en pied pour nous montrer sa technique et le fruit de sa cueillette. Incrédule, je le vois arracher à tour de bras des tomates complètement vertes. Ça a l'air facile. J'arrache donc une tomate pas mûre et la lui tends fièrement, confient d'obtenir en retour un signe d'acquiescement. Le voilà qui s'en saisit et qui me fait : «No, No, No, No, No, No ». Retenant mon envie de lui cogner le casque pour le rebooter, je regarde avec plus d'attention ce qu'il a cueilli, je regarde à nouveau le légume dans ma main... ??? No comprendo, aucune différence... il en recueille une bonne, je la regarde... ??? Bon, chou blanc, je passe. Pendant ce temps, Amélie cueillait de bonnes tomates pas mûres et remplissait la caisse...
Il se trouve que toutes les tomates étaient vertes mais avaient des nuances de blanc, de jaune, de rouge...
Bref, mon daltonisme deutéranopte deutéranormal n'était pas le bon outil pour ce taf, je n'ai donc servi à rien, au sens le plus strict du terme. Je me suis contenté de pousser le chariot pendant qu'Amélie le remplissait seule, péniblement. Quand nous apprîmes que la benne de tomates (équivalent de 5h de boulot) nous rapporterait 30$, nous décidâmes de mettre un terme à notre collaboration avec bibi.
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